Wednesday, January 27, 2016

Open Jazz : une émission au diapason d'Alex Dutilh

Open Jazz consacre une heure au jazz sur France Musique, du lundi au vendredi à 18h. La préparation chronophage de cette émission, présentée par Alex Dutilh, fait le plus grand bonheur de ce passionné de jazz.

Après avoir passé les gardes à l'entrée de Radio France, Emmanuelle, attachée de production d'Open Jazz, montre le chemin jusqu'au studio au deuxième étage. Il est 16h15, l'émission – aujourd'hui pré-enregistrée – démarre. Alex en est le présentateur depuis maintenant 7 ans, et reçoit aujourd'hui le saxophoniste israélien Shauli Einav.

La partition de l'émission : préparation 
 
« Je reçois 300 disques par mois », explique Alex. « Je fais le choix des titres à diffuser ensuite, car j'aime bien les classer par thèmes – en prendre certains qui ont la même atmosphère ou genre musical par exemple, pour faire des émissions cohérentes ensuite. » 

C'est donc grâce à un grand travail de préparation en amont qu'Alex peut se permettre d'improviser en direct. « En musique c'est pareil », compare-t-il, « ce n'est qu'en travaillant dur et en connaissant parfaitement sa partition qu'on peut ensuite ne plus la lire et la rendre personnelle, sans pour autant faire de fausse note. »

Il établit un planning à l'avance, en fonction des rubriques de l'émission : jazz culture – ce qu'il se passe dans la jazzosphère autre que la musique elle-même ; jazz au trésor – où il exhume des disques vinyle non réédités, qu'il passera ensuite durant toute la semaine et qu'il numérisera pour ajouter à la discothèque de Radio France. S'en suit la rubrique jazz trotteur – parlant des concerts à l'étranger ; avant enfin d'annoncer les événements et concerts à venir à Paris et en province. Parfois en fin d'émission, des places sont à gagner via le jazz bonus.

Alex Dutilh (centre) pendant l'Open Jazz ouvrant le festival de Reims en 2015 / G. Garitan / cc

« D'ailleurs l'émission a son poids, du côté de la publicité des concerts », observe Emmanuelle. « Quand il y a eu la grève à Radio France pendant un mois entre mars et avril dernier, les salles nous ont appelé pour se plaindre qu'il avaient bien moins de monde qui venaient à leurs concerts ! »

Shauli et son attaché de presse repartent. Alex retrace leur historique : « ce saxophoniste, je l'ai repéré il y a trois ans lors d'un concert en Israël. Depuis, je l'invite régulièrement et passe ses CDs dans l'émission, car je trouve ça vraiment dommage qu'on ne soit pas assez au courant ici de ce qu'il se passe dans le monde du jazz au-delà de la France et des Etats-Unis. » Aujourd'hui, il passait le nouveau disque de Shauli, son troisième.


La représentation de l'émission

Dans la salle des techniciens, Fabien, réalisateur depuis plus de 20 ans, et Frédéric, technicien depuis 11 ans ici, s'occupent du bon déroulement de l'émission. « Moi je cale les disques selon le conducteur que me donne Alex », explique Fabien. 

Un conducteur est, en musique, ce qui est utilisé par le chef d'orchestre pour suivre toutes les partitions des différents groupes d'instruments en jeu. Ici, c'est son équivalent radio : une fiche que lui donne Alex au début de chaque émission, où est détaillé chaque segment et sa durée dans le bon ordre.

Le studio de l'émission, du côté des techniciens / Marguerite Gallorini

Le présentateur parle quelques minutes, avant de passer le morceau présenté, et ainsi de suite. Ce format permet un court relâchement pour le présentateur, quoique relatif : il n'a aucun texte préparé. De premier abord, il est donc étonnant de le voir regarder si peu son écran d'ordinateur quand il parle.

« Au début j'écrivais mes textes, mais maintenant c'est fini, et ça n'est pas pire, au contraire. C'est plus vivant, et les quelques fois où je bafouille ne sont pas gênantes, car ça reste réel. » Le temps des morceaux lui donne donc le temps de réfléchir à la suite : en effet il ne bafouille que rarement.

« Ce qui est marrant, c'est que je cherche plus mes mots quand je sais qu'on enregistre, contrairement au direct ! », ajoute-t-il amusé. « Ah mais ça c'est typique », rétorque le deuxième technicien, Frédéric. « C'est pas le même genre de pression, donc en se relâchant on fait plus de bêtises. »

Pour Alex, qui a travaillé en presse écrite depuis 1972, la radio est un changement de rythme bienvenu. Ayant commencé en tant que bénévole pour un magazine de jazz, il fut ensuite rédacteur-en-chef du magazine Jazzman entre 1992 et 2009. « Je dirais que durant ce travail, j'avais 50% de plaisir et 50% de pénibilité. Ici en radio, c'est 90% de plaisir et 10% de pénibilité. Je travaille pourtant non-stop... mais c'est ce que j'aime ! »

Cet article fut écrit en tant que devoir universitaire.