Monday, March 21, 2016

Athènes étranglée par les taxes des créanciers

Manifestation à Athènes en 2014 - Capture d'écran / Documentary Films / Youtube


La troïka a quitté Athènes pour une pause dans les discussions sur la dette et les réformes de la société grecques. L’occasion pour la presse du pays de faire un bilan des négociations.

“Les éleveurs qui ont de l’expérience savent que tirer constamment le lait d’une vache peut avoir des résultats contre-productifs. Le gouvernement grec et, dans une certaine mesure, les créanciers et partenaires du pays semblent ignorer ce sage dicton.”  Tel est le point de vue du quotidien grec I Kathimerini sur les négociations qui ont eu lieu à Athènes avec la mission d’inspection de la Commission européenne, de la Banque centrale européenne (BCE) et du Fonds monétaire international (FMI) durant deux semaines et demie.

Aucun accord n’a été finalisé : le but est d’en trouver un d’ici au 11 avril, avant la rencontre avec l’Euro Working Group. Pour le moment, la troïka a quitté la Grèce dimanche 20 mars et viendra reprendre les discussions le 2 avril, après la Pâques grecque. Au programme des négociations : de nouvelles taxes sur le produit intérieur brut (PIB) grec et la réforme du système des retraites, nécessaire pour qu’Athènes puisse prétendre à un nouveau prêt et à un allègement de sa dette.

Des taxes qui étouffent la société grecque

Si les ministres de l’Economie allemand et français, Wolfgang Schäuble et Michel Sapin, semblent optimistes, le journal conservateur I Kathimerini l’est beaucoup moins. Dans ses pages économiques, il est très critique envers les mesures exigées par la troïka, comme la taxe sur le PIB :
Aucun autre pays de l’Union européenne […] n’a fait l’expérience d’une hausse aussi forte [que celle de la Grèce] de la taxe sur le PIB. Il n’est pas surprenant qu’aucun autre pays n’ait fait l’expérience d’une telle contraction économique non plus. […] Malheureusement, le niveau de cette taxe va augmenter cette année pour la Grèce, et peut-être aussi en 2017.”

Le gouvernement grec a aussi accepté de réduire le seuil d’exonération d’impôts de 9 550 à 9 100 euros ; mais le FMI voudrait l’abaisser jusqu’à 7 000 euros (à titre de comparaison, en France, il est de 9 700 euros). “Dans tous les pays européens, [ce seuil] protège les populations les plus vulnérables : les enfants et les personnes âgées vivant seules”, s’insurge l’un des éditeurs du quotidien To Vima. “Aujourd’hui nous assistons à des négociations [où personne n’empêche] l’augmentation des recettes publiques en attaquant [ces populations].”

De vraies réformes nécessaires ?

Dans la même colonne, To Vima ne va pas sans condamner les petites corruptions quotidiennes de la société grecque elle-même qui, selon lui, l’ont en partie mise dans la situation actuelle :
Pour la première fois en six ans, [nous avons] un gouvernement qui n’a pas pratiqué ni connu l’évasion fiscale. Et comme nous le savons tous, ce sont des mesures que nous aurions dû mettre en place depuis longtemps, comme l’ont fait d’autres pays européens qui se sont sortis de la crise. […] Malheureusement, aujourd’hui, nous en payons tous le prix, avec cette ‘taxe des plus faibles’.”
Pour I Kathimerini, ce sont des réformes qui n’en sont pas, et le problème se trouve dans l’entêtement à faire payer toujours plus sans laisser une vraie embellie économique avoir lieu : “Nos créanciers ont perdu tout espoir de véritables réformes et ne pensent qu’à additionner les chiffres, résume-t-il. Imposer de plus en plus de taxes ne garantit pas de les recevoir effectivement. Mais surtout, c’est sonner le glas de tout élément productif et créatif qui subsistait dans la société grecque.”

Cette revue de presse fut publiée sur Courrier International


No comments:

Post a Comment